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27 Avr 2020

L’application StopCovid : réactions en chaîne autour d’un maillon de la stratégie de déconfinement

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 Le 28 avril l’Assemblée Nationale devait débattre et voter les modalités d’une application de suivi sanitaire des citoyens dénommée StopCovid et utilisée sur la base du volontariat. Cette application encore à l’état de projet a déjà suscité nombre d’avis et de tribunes publiée dans la presse ces derniers jours. Mais il n’est pas certain qu’elle soit prête à temps et pour le Conseil Scientifique, il faudra de toute façon à côté des outils numériques, mobiliser d’importants moyens humains pour les enquêtes épidémiologiques et l’accompagnement sur le terrain. Le premier ministre ayant confirmé le 28 avril que StopCovid ne pourrait être lancée le 11 mai, le débat a été repoussé...et la CNAM s'est vu confier la tâche des enquêtes "cas contacts" après dépistage et confirmation des diagnostics Covid19 par les médecins de ville

Le 8 avril dernier, on apprenait qu’un travail était en cours pour construire le prototype d’une application française, StopCovid, dans le cadre d’une stratégie globale de déconfinement. Le leadership du projet, qui associe acteurs publics et privés*, a été confié à l’INRIA (Institut national de recherche en sciences et technologies du numérique).
Depuis, avec une habitude bien française du débat, chacun y va de son opinion. Pour les uns, il s’agit d’un « projet désastreux piloté par des apprentis sorciers » tandis qu’en général, pour le milieu médical, la détection rapide et exhaustive des contacts est essentielle pour garantir le contrôle de l’épidémie, et donc une application numérique, sous réserve d'assurer sécurité et confidentialité, peut constituer un des éléments d’un ensemble de mesures à prévoir dans un cadre de déconfinement.
Le débat est aussi technologique. La France a fait jusqu’ici le choix de centraliser les données avec un pilotage étatique plutôt que de les voir stockées sur des téléphones dont les systèmes de sauvegarde sont aux mains d’Apple et de Google. Ces derniers, très actifs dans la lutte contre l’épidémie, n’ont d’ailleurs pas tardé à proposer une API commune pour héberger toutes les applications de « tracing » développées dans le monde entier.
Le recours aux services d’Apple et Google a été écarté par le secrétariat d'Etat au Numérique : l’Etat veut décider de l’algorithme. Mais voilà-t-il pas que l’Allemagne qui soutenait une position centralisée, vient de faire volte-face et de passer du protocole ROBERT ( ROBust and privacy-presERving proximity Tracing) élaboré par un consortium européen au DP3T (Decentralised Protocole Privacy Preserving Tracing) décentralisé plus en phase avec l’approche d’Apple et Google. Sans compter les difficiles discussions engagées avec Apple sur le bridage du Bluetooth, StopCovid risque d’avoir bien du mal à sortir pour le 11 mai.

Une application de contact

L’application StopCovid, comme toutes les applications de contact (Contact tracing) n’utilise pas le GPS du téléphone trop intrusif, mais le Bluetooth Low Energy (BLE). L’app envoie un identifiant anonymisé aux téléphones du voisinage via le réseau Bluetooth local. Il n’y a donc transmission d’aucune données de localisation.
Adaptée au cas du Covid, l’app prend en compte la distance entre les téléphones et la durée du contact. Lorsqu’une personne est malade, son identifiant est envoyé sur le serveur sur lequel tous les mobiles se connectent. La liste des personnes malades est actualisée par les téléphones qui préviennent aussitôt ceux qui ont été en contact plus de dix minutes avec le téléphone ajouté à la liste.
« La seule information qui m’est notifiée est que mon smartphone s’est trouvé dans les jours précédents à proximité du smartphone d’au moins une personne qui a, depuis, été testée positive et s’est déclarée dans l’application », explique le PDG de l’INRIA, Bruno Sportisse, sur le site de l’institut 
Le gouvernement a choisi de lancer cette application sur le mode du volontariat. Il n’est en effet pas indispensable que tous soient équipés pour que ça fonctionne utilement. La CNIL a été saisie le 20 avril par le secrétariat d’Etat au Numérique et son avis a été rendu public. Le projet doit être conforme avec le RGPD et se situer dans le cadre d’une mission d’intérêt public; l’atteinte à la vie privée n'est admissible que si la preuve est apportée de l’utilité d’un tel dispositif à la gestion de la crise et de la sortie du confinement. Ce qui veut dire qu’après une alerte, on doit pourvoir échanger avec une personne qualifiée, que les autorités de santé doivent être impliqués, que les informations doivent être bien claires avec droits d’accès à ses données.

Le recours indispensable aux moyens humains

Dans son rapport du 20 avril, le Conseil Scientifique insistait sur la nécessité de former des équipes mobiles de contact tracing et d’enquêteurs pour repérer les contacts, remonter les chaînes de transmission, et appeler les personnes atteintes. Le président du Conseil scientifique, le Pr Jean-François Delfraissy, estime que 20 à 30.000 personnes seront nécessaires pour faire face aux nouvelles contaminations. Elles auront également besoin d’outils numériques.
Mise à jour du 29 avril : la CNAM a été chargée de cette mission et a annoncé que plusieurs milliers de ses collaborateurs seront mobilisés aux côtés des professionnels de santé et des ARS pour assurer la détection et le suivi des personnes malades et de leurs contacts. Dans un premier temps, à partir du 11 mai, le médecin généraliste reçoit le patient et prescrit un test pour confirmation du diagnostic. Il remplit une déclaration obligatoire transmise à un système informatique qui la communique à l'Assurance maladie. Si le médecin le souhaite il peut lui même procéder à l'enquête pour recueillir des informations sur les "cas contact" ou déléguer cette tâche aux équipes de l'Assurance maladie tenues au secret médical. Des aménagements législatifs doivent intervenir pour cette extension du rôle de l'Assurance maladie.

*ANSSI, CapGemini, Dassault Systèmes, INSERM, Lunabee Studio, Orange, Sante publique France et Withings

A propos des gestes barrières : simuler un éternuement

Dassault Systèmes a simulé ce qui se passe pendant un éternuement. Sur cet écran, on voit l'effet protecteur de la visière. Mais sur la video,  le résultat est éloquent quant à l'éternuement dans son coude qui n'apparait que peu efficace. Voir la vidéo

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